Un roman de très haute volée révélant une connaissance particulière du monde rural ainsi que de la chasse. L’âme du fusil est une partie essentielle d’un fusil, un terme technique qui désigne le diamètre du canon d’un fusil. Un objet essentiel à la vie du personnage principal, Philippe.

L’âme du fusil, Elsa Marpeau
182 pages – Genre Romans noirs
ISBN : 9 782072 925573 – Paru le 26-08-2021
Prix (TTC) : 16 €
Éditeur : Gallimard – Collection, Série Noire
ISBN : 9782072925573
Maquette de couverture : Martin Corbasson
Quatrième de couverture L’âme du fusil
Depuis qu’il est sans travail, Philippe passe ses journées à attendre. Attendre que Lucas, son fils de seize ans, rentre du lycée, attendre que sa femme termine sa journée de travail. Il n’y a guère que les dîners du dimanche avec ses copains du hameau, la chasse et la perspective d’y initier son fils qui rompent le fil des jours.
Lorsque Julien, un Parisien venu se terrer dans la maison d’en face, débarque, la vie de Philippe bascule. Il se met à épier ce voisin qui le fascine et l’obsède, cherche à le faire accepter de son entourage qui s’en méfie.
Tout au bonheur de se sentir à nouveau vivant et utile, et d’exister pour son fils et ce voisin novice, Philippe ne voit pas poindre le drame.
Ce que je pense de L’âme du fusil
Un roman noir de haute volée
Il s’agit d’une confession ou plutôt d’une lettre testamentaire, qui constitue un superbe polar rural.
L’action, ou plutôt l’inaction, se passe à Courcy Aux Loges, petite bourgade dans le Loiret, proche de Pithiviers, car c’est l’art de l’auteure de faire un roman uniquement avec des ressentis, sans grands mouvements, dans une campagne vide, abandonnée, où les grandes étendues ne sont entrecoupées que par des arbres. Certes, près du personnage principal, il y a une petite forêt avec un étang.
Philippe est un homme désœuvré dont la vie familiale est en perdition, il a perdu son emploi. Pour meubler son temps, il part avec son chien à la chasse, son ultime loisir. Il parcourt tout le terrain autour de l’étang tous les jours. Il est en quête de pardon et crie son désespoir. Une fois, il voit dans une maison qui normalement était abandonnée un homme qui en sort, se déshabille et va se baigner tout nu dans l’étang.
Philippe va chercher à comprendre ce qu’il se passe et va être obnubilé par le voisin, Julien. Il va l’espionner, rater aucun de ses gestes, car il est persuadé qu’il va se passer quelque chose. Il ne sait pas mais il a cette certitude.
Un jour, ce quelque chose va arriver. Philippe aura beaucoup de mal à cerner les contours du drame qui va se nouer devant ses yeux, avec ou sans sa participation.
La vengeance est un plat qui se mange froid.
Spécialiste du polar à la française, Elsa Marpeau dresse ici un portrait intéressant de la vie rurale et de la chasse. Elle entre dans des détails frisant l’érotisme dans une intrigue sous haute tension. Elle met en scène des hommes, pas des héros, avec beaucoup d’humanité. Elle fait craqueler les carapaces des gens du terroir. Les non-dits, les silences, révèlent les relations entre ces êtres en perdition.
L’analyse du drame est très fine. L’auteure relate avec précision la fierté masculine de ces hommes attachés à leur mode de vie, fait surtout de silence et de vérité tue.
Ce n’est pas forcément écolo mais Elsa Marpeau décrit avec justesse la nature vue par Philippe, et cela dérange.
Ce polar rural très bien écrit s’attache à respecter le langage local que je connais bien puisque je réside près d’Orléans. Le lecteur est tenu en haleine jusqu’au bout.
Un excellent polar noir, au souffle puissant.
Le scénario est excellent, bien construit, nerveux, convaincant. Les dialogues font ressortir des propos maladroits, crus souvent, qui prennent un relief intéressant entre les silences des taiseux. Elsa Marpeau est talentueuse et révèle une connaissance sans faille de ce milieu.
N’attendez pas plus longtemps, procurez-vous ce livre et lisez-le, vous ne serez pas déçu.
Citations
« Là, tapi dans l’herbe, les yeux au ciel sans vraiment voir, je nous imaginais tous les deux, père et fils, côte à côte, silencieux, tendus ; j’avais tellement hâte de lui faire partager la tension, l’eau des lacs et des marais, les ciels d’automne, le frisson délicieux de celui qui vient de toucher sa proie, qui ne l’a pas forcément tuée – le canard démonté, qui peut piéter sur la terre -, mais qui vient de lui briser l’aile. »
L’auteure, Elsa Marpeau

Elsa Marpeau a grandi à Nantes, s’est installée à Paris et a vécu à Singapour. Après Les yeux des morts (prix Nouvel Obs-BibliObs du roman noir 2011) elle a publié Black Blocs, L’expatriée (prix La plume de cristal 2013). Et ils oublieront la colère et Les corps brisés dans la Série Noie. Elle est également créatrice de la série Capitaine Marleau.
Elle continue à tracer son sillon dans le champ du roman noir français avec Son autre mort, son sixième livre dans la Série Noire.
Pour en savoir plus sur Elsa Marpeau
Du même auteur
Aux Éditions Gallimard
Son autre mort, Série Noire, 2020, Gallimard éditions, 295 pages – mars 2020
Les corps brisés, Série Noire, 2017, GALLIMARD éditions, 240 pages – avril 2017 – Prix 19 €
Les yeux des Morts, Série Noire, 2010 (Folio Policier n° 656)
Black Blocs, Série Noire, 2012
L’expatriée, Série Noire, 2013 (Folio Polivier n° 736)
Petit éloge des brunes (Folio 2€, 2013)
Et ils oublieront la colère, Série Noire, 2015
Chez d’autres éditeurs
Recherche au sang, Éditions du Félin, 2003
En pièces, Éditions du Panama, 2006
Si vous souhaitez en savoir plus sur Elsa Marpeau
© Jean-Louis RIGUET 29 octobre 2021 – Sociétaire de la Société des Gens de Lettres
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