Des mots pour vous
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JL à l’écoute de …
Aujourd’hui Michel PRADES
Qui nous a fait le plaisir de nous relater
son entretien avec Richard Bohringer
(texte en fin de chronique)
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1/ Qui êtes-vous ?
Michel Prades
Naissance : 6 juin 1954 à Le Puy en Velay
Quel est votre parcours ?
1972 : Bac C
1974 : Niveau B.T.S. Agricole
1975 : Diplôme de berger à Saint Yriex la Perche
1976 : Professeur de zootechnie dans une Maison Familiale et Rurale en Normandie
1978 : Agriculteur en Limousin
1980 : Fondateur, compositeur et chanteur d’un groupe de Rock Agricole « Gendarmerie Nationale » en Limousin
1981 : Animateur d’une radio régionale « Radio trouble-fête » à Limoges.
1982 : Vice-président de l’association culturelle du Château de Ligoure en Limousin
1983 : Accident de la route au Vigen en Limousin. Hémiplégie & Aphasique
1987 : Membre du Conseil d’administration de la Fédération Nationale des Aphasiques de France
CD « Jean Langlais & Michel Prades » éditions Groupe des Aphasiques de l’île de France aidée par la Fondation de France
Vidéo du groupe « Gendarmerie Nationale » au château de Ligoure
1989 : CD « Avant-Après » par Gendarmerie Nationale (éditions en Limousin)
1991 : Directeur de publication & rédacteur en chef d’une revue mensuelle de poésie « Libelle » de l’association loi 1901 « Libelle » à Paris
Micro revue mensuelle de poésie qui débute en 1991 par la création d’une association loi 1901 qui a pour nom « Libelle » dont l’objet est la publication de la revue de poésie Libelle. Bernard Rivet et Michel Prades sont les membres fondateurs.
En 1994, Bernard Rivet « a rejoint les grands indiens » comme l’a dit Richard Bohringer. Nous vous livrons ici la conception « rivéenne » du poème : « Sans lieu ni date. Le poème s’inscrit à l’envers du non-sens : mots de chair vive et sable chaud, verbe arraché aux brûlures du soleil, à l’angle de la pierre. Son dernier domicile est dans le vent ».
Michel Prades et ses animateurs continuent pour lui.
Sans prétention et avec de petits moyens, elle s’étoffe en qualité (pages, tirage…). Elle publie des inédits de poésie contemporaine en restant ouverte au plus grand nombre de poètes, peu ou pas connus, et aux maximums de styles. Elle est le reflet des goûts les plus divers et affiche des aspirations profondes. Un bulletin anthologique paraît chaque année, proposant un éclectisme poétique de bon aloi. Libelle est un rêve porté à bout de bras par une équipe bien motivée.
Depuis plusieurs années, avec ce petit recueil de poèmes, vous prenez connaissance du « microcosme » et de ses acteurs, de quelques critiques, de beaux dessins, de l’annonce des concours et d’un bloc-notes en six pages. C’est une revue ouverte aux jeunes auteurs (nous voulons dire jeunes par la pratique de l’écriture). Le lectorat est très ouvert : 80% d’auteurs inconnus qui expédient leurs travaux, 20% des auteurs abonnés à la revue.
Comme nous recevons de plus en plus de textes au fur et à mesure qu’on nous connaît, nous sommes un peu plus exigeants sur la « qualité », sur le travail poétique, mais toujours aussi libres, toujours aussi ouverts. Chaque mois, mille exemplaires sont expédiés aux abonnés et aux revues de poésie françaises et étrangères.
Libelle est une histoire d’amitié, d’amitiés, un cas d’écriture non installé, volontairement non installé. Bien sûr, il nous faut aussi des lecteurs, et nous comptons sur vous, sur le bouche-à-oreille pour amener d’autres abonnés. Nous comptons vivement sur le soutien fidèle des abonnés, unique condition de notre existence pour attaquer les années à suivre avec sérénité.
Fiche technique la revue mensuelle de poésie « Libelle »
Dénomination : LIBELLE
Raison sociale : Association loi 1901 « Libelle »
Statut : Association loi 1901 « Libelle »
Adresse : 14, rue du Retrait
Code postal : 75020
Ville (+ Pays) : Paris – France
Téléphone : 01 43 15 24 29
Email : pradesmi@wanadoo.fr
Site web : www.libelle-mp.fr
Nom du responsable : Prades Michel
Illustration : Cirès-Brigand Michèle
Spécialités / Genres : Poésie, Nouvelle, Chronique,
Bloc-notes & Concours
Fréquence de publication : Mensuel
Prix de vente au numéro : 2 €
Prix Abonnement : 25 €
Prix Abonnement de soutien : 40 €
Tirage : 1000 exemplaires
Date de la première création : Décembre 1990
Éditeur : Association loi 1901 « Libelle »
1992 : CD «Je suis» éditions 3LP/DM Studio
« Voix avec issue » Émission Aléas : magazine de l’imprévisible. Production producteur ou co-producteur France Régions 3 Limoges. Générique réalisateur Marianne Gosset. Participant Michel Prades. Ex-agriculteur et éleveur est devenu chanteur après un grave accident au cours duquel le côté droit de son cerveau a été atteint. Il s’agit en fait du centre du langage, alors qu’il est frappé d’aphasie il chante avec une aisance surprenante. En fait le centre du langage n’est pas le même que le centre de la mélodie.
1993 : CD « Comment je chante » Portrait de Michel Prades. «Ça n’arrive qu’aux autres» une émission du Comité national français de liaison pour la réadaptation des handicapés. Réalisation : Thierry Ducluzeau assisté d’Olivier Benard. Merci à Richard Bohringer à Rémy, Marc, Patrick et Kiss FM pour leur assistance.
Texte relaté en fin d’interview.
1994 : Clip Vidéo « Vampyr » & Film portrait « Pradou » Réalisation de Patrice Rolet à Paris
2000 : MMMMMMM de Boris Auchour. Installation sonore diffusée dans l’espace public créée pour le Printemps de Cahors Sensitive (16 juin – 2 juillet 2000) avec le soutien de la Caisse des dépôts et consignations. Voix : Michel Prades.
Ton récit Michel est une épreuve mais une grande joie car « la liberté » de la parole, de ta parole domine derrière le texte ou le récit. C’est un langage d’aphasique qui n’est plus aphasique. Il faut continuer les expériences, d’événements car tu progresses toujours ainsi.
Orthophoniste : Philippe Van Eeckout
CD «Hidalgo de Castille» Pradou : Paroles Dom’s : Chant & guitares Damien: Percussion (éditions en Limousin)
2001 : CD «Les femmes sont comme ça» avec Larry Tomko : chant, musiques, orchestrations & mixages (éditions en Berry)
2003 : Roman «Ma dame de vie» aux éditions Armand Brière à Paris
2009 : «Unis vers l’Uni» avec l’animateur Jean-Claude Carton sur ID FM Radio Enghien (98.0 Mhz) invité : Michel Prades : Écrivain, Poète, Chanteur & Aphasique & accompagné de Valérie Bellet & Patrice Rolet
2/ Que faisiez-vous avant d’écrire ou parallèlement à l’écriture ?
Agriculteur
3/ Qu’aimez-vous ou pratiquez-vous comme autre art ? La peinture ? La sculpture ? Le cinéma ? La photographie ? Le théâtre ?
J’écris essentiellement
Quelle est votre autre passion ?
La poésie
4/ Qu’attendez-vous de vos lecteurs, admirateurs ?
Comment vous faites-vous connaître ?
Par mon mensuel de poésie et mon site
Comment allez-vous à leur rencontre ?
Dans les salons et festivals
5/ Faites-vous des rencontres, des lectures ou des conférences sur vos ouvrages ?
Oui
6/ Depuis quand écrivez-vous ?
Depuis l’âge de 12 ans
Qu’avez-vous déjà écrit ?
* Un morceau de saucisson, 1974 (autoédité en Normandie)
* La Fournaise avec Fernand Cressent, 1974 (autoédité en Normandie)
* Dégueulis pour une société moins dégueulasse avec Yannick Biot, 1975 (autoédité en Limousin)
* C’est la peine de gueuler, 1975 (autoédité en Limousin)
* Tuerie en Limousin, 1975 (éditions en Longueur)
* L’idée de toi, 1976 (éditions des Bufatières Fantastic Fabulous Folies)
* Etreintes cosmiques, 1976 (éditions du Castor Astral)
* Ma dame de vie, 2003 (éditions Armand Brière)
7/ Quel est votre dernier livre ? Pouvez-vous nous en parler ?
«Ma dame de vie» aux éditions Armand Brière à Paris
8/ Où peut-on se procurer vos ouvrages ?
Chez moi
9/ Quelle est votre position par rapport aux publications à compte d’éditeur, à compte d’auteur ou à compte participatif ? À l’e-book ?
/
10/ Quel est le conseil le plus important que vous ayez reçu ? Pas forcément pour les livres ?
/
11/ Que préférez-vous écrire ou lire : des romans, des poésies, des essais, des nouvelles, des biographies ?
De la poésie
12/ Comment écrivez-vous ?
Dans le calme
13/ Où puisez-vous votre inspiration ?
Dans la vie
Avez-vous eu des commandes d’ouvrages ?
Non
14/ Comment construisez-vous vos intrigues, vos personnages ?
A partir de mes souvenirs
Vos personnages sont-ils toujours imaginaires ?
Non
15/ Quel conseil donneriez-vous aux amateurs d’écriture ?
Vivez d’abord !
16/ Quels sont vos auteurs préférés ?
Rimbaud, Hugo
17/ Que lisez-vous en ce moment ?
Aphasie, l’histoire d’un combat de Jacqueline Bano-Souder
18/ Travaillez-vous sur de nouveaux projets ?
Je travaille chaque jour à mon mensuel de poésie Libelle
19/ Avez-vous des dates d’événements à venir ?
Le Festival de poésie Voix Vives de Méditerranée en Méditerranée accueille à Sète du 21 au 29 juillet 2017 plus de cent poètes venus de toutes les Méditerranée.
20/ Où peut-on suivre vos actualités ? Vos parutions ?
Site web: www.libelle-mp.fr
Le 3 juillet 2017.
Michel Prades
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Entretien de Michel Prades avec Richard Bohringer
CD « Comment je chante » Portrait de Michel Prades.
«Ça n’arrive qu’aux autres» une émission du Comité national français de liaison pour la réadaptation des handicapés.
Réalisation : Thierry Ducluzeau assisté d’Olivier Benard.
Merci à Richard Bohringer à Rémy, Marc, Patrick et Kiss FM pour
leur assistance.
PRADES Michel :
Je suis né 10 ans après le débarquement : le 6 juin 1954. Enfant, j’ai aimé lire des écrivains de dix-neuvième siècle. Et à 12 ans, j’ai commencé à écrire des strophes et à 15 ans de la prose, à 22 ans pas mal de mes recueils furent diffusés. En 1977, au début de mon installation comme fermier, j’ai arrêté d’écrire des poèmes.
DUCLUZEAU Thierry :
Richard Bohringer, on vous connaît comme comédien et c’est vrai que vous avez un bouquin. Vous chantez aussi et puis vous êtes animateur radio à Kiss FM. J’aimerais avoir l’envie de lire et de dire l’antenne des poèmes de Michel Prades ?
BOHRINGER Richard :
Michel Prades, c’est un beau poète. Sa vie, son témoignage existentiel, pour sa façon d’avoir lutté c’est quelque chose qu’on doit donner aux autres qui se sentent un peu perdus devant leurs propres événements, devant leur propre lassitude. Faire voir qu’il y a des gens qui ont été plus blessés, plus à lutter pour se réinstaller dans leur corps et dans leur âme. Prades, c’est un bon pédagogue, c’est le contraire du prédateur. C’est un homme qui est vertical. Qui aime infiniment la vie ; ses troubles. Qui accepte les jolis oiseaux miraculeux et ainsi que les vieilles corneilles nauséabondes. J’aimerais lire un texte de Michel. Et alors, on va lire L’Ile de Quiberon. Je ne l’ai jamais lu donc on va voir ce qu’il est arrivé.
À te croire si près de moi
Trop de gens ont pensé
Que tu étais insoupçonnable
Mais sur ta paume droite
Des idées noires ont jailli
Et du sang a giclé de ta ligne de vie.
La petite croix sur le pouce
Savez-vous ce que c’est ?
Ne me perdez pas dans le bois
Maman, je vous aime trop pour vous voir disparaître
Entre les feuilles mouillées
D’un arbre qui vous en veut.
Ne me quittez pas puisque vous voulez crier:
C’est que la pluie n’a pas d’effet sur vous.
Je l’ai laissé partir
Le seul enfant au cerceau.
Tranquille je suis.
Ne m’en veuillez pas
A vous garder fidèle
Mais mon cœur a d’autres préoccupations.
Vivez le temps qu’il faille.
Pleurez dans un mouchoir.
Crachez vos langues sales et dépourvues d’intérêt.
Donnez-leur à vos amis.
C’est un remède sensationnel
Contre le mal de penser.
C’est vachement joli. En fait, ça s’appelle l’Ile de Quiberon. Il a eu cette inspiration à l’Ile de Quiberon. L’Ile de Quiberon ses contours ne sont pas clairement dessinés.
MICHEL :
Quand j’avais 14 ans, au Puy-en-Velay, j’écoutais de la musique Pop. À 16 ans mon cousin m’a donné sa guitare sèche. J’ai appris quatre accords : La, Ré, Mi et Sol. Les accords avec des barrés sont trop durs. J’ai mis en musique mes nouveaux poèmes et monté un groupe « The Band with no name ». Le groupe sans nom avec un batteur, deux guitares électriques et ma voix. Le groupe répétait dans la cave du café de ma mère. On s’amusait bien.
RICHARD :
J’aime bien quand il est gai, Michel. Il est souvent gai. Alors, il a des trucs. Ça s’appelle Pour initiés only. Prades il est très corrosif et de temps en temps. Moi-même, j’ai eu du mal à comprendre mais c’est quand je ne comprends pas…
Le veau de boucherie
Subit la démonstration
De ce monsieur au képi
Dans un centre de gestion.
Je répète.
Le veau de boucherie
Subit la démonstration
De ce monsieur au képi
Dans un centre de gestion.
C’est une métaphore.
Les productions céréales
Me laissent et je ne sais
Si ma débilité les satisfait
Les gluco-branlogènes,
Les sidérophylis,
La proxénéto-molécule,
L’acide à minettes,
La maquero-molécule.
Tout aussi marrant.
La soif de savoir,
Le désir d’apprendre
Ou la connerie assumée.
Le sentiment d’être utile,
La vérité au bout du texte,
Les arguments nécessaires,
Les classements à complexes.
POUAH !!!
Vous comprenez que je ne peux qu’avoir de la sympathie pour un oiseau pareil.
MICHEL :
Á 18 ans, après mon bac C, j’en avais marre de mes parents. Alors, je suis parti à Roanne pour préparer un brevet de Technicien Agricole que je n’ai pas réussi mais j’ai continué à écrire des poèmes, des lettres d’amour à Mimi, ma compagne et des chansons. Je me suis trouvé‚ au chômage pendant deux ans. J’ai enseigné dans une Maison Familiale et Rurale en Normandie. J’ai passé un brevet d’éleveur de moutons près de Limoges. Je l’ai obtenu puis deux ans au chômage. J’ai cherché une ferme et je l’ai trouvée à côté de Limoges. La ferme était en ruine. J’ai tout refait avec ma compagne, Mimi. J’étais fermier. La propriétaire possède quatre cents hectares, huit fermes dont la mienne et le château. A la ferme, je m’occupais des moutons et Mimi étudiait les Arts Décoratifs à Limoges.
THIERRY :
Richard Bohringer, ça fait longtemps que vous connaissez Michel Prades ?
RICHARD :
En termes rationnels, ça doit faire quelques années. En termes universels, ça doit faire des siècles.
THIERRY :
En fait, vous vous êtes rencontrés sur le tournage d’un de vos films en 1981.
RICHARD :
Encore en termes professionnels, c’est dit. Alors, on s’est rencontré lors d’une aventure avec un jeune homme qui venait de Limoges et qui faisait un court-métrage son premier film et qui s’appelait Jérôme Boivin. C’était un très joli court-métrage qui s’appelait : « Café-plongeoir » que j’ai failli ne pas faire par imbécillité et que Ma Blonde m’a obligé à faire et je lui suis infiniment reconnaissant car c’était l’un des plus beaux films auxquels j’ai participé. J’ai rencontré Michel dans le Limousin qui est une forte belle terre avec beaucoup de vert, avec beaucoup de rivières. Alors voilà, j’ai rencontré ce mec qui faisait un retour à la terre. Il avait une grande lassitude mais une lassitude assez gaie. Il était avec sa nana.
THIERRY :
Et tout de suite, il vous a fait découvrir ses poèmes ?
RICHARD :
Non, non, ce qu’on a découvert c’est la convivialité. Le plaisir de se connaître. A l’époque, je n’étais pas une vedette et notre rapport étaient plus simple et clair. Il n’y avait pas d’embrouilles possibles. Non, non, on s’est simplement connu ; ce qui était déjà un poème. Ça veut dire faire connaissance, s’apprécier et puis la vie a passé. Je suis reparti et je ne pouvais pas rester en Limousin et puis, j’avais envie de leur donner un coup de main et puis je ne savais pas comment faire. Il faisait du poulet avec sa nana. Un jour, j’ai donné une série de concerts à Paris au Forum des Halles et puis je leur ai dit :
– Venez avec des poulets et il y aura des mecs qui vous les achèteront.
Ils sont arrivés tous les deux avec un paquet des poulets dans les paniers, dans les poches. Ma foi, ils ont vendu un peu mais ils n’ont pas vendu mais importe.
MICHEL :
En 1981, les flics sont venus chez moi pour faire une perquisition, à six heures, pensant découvrir un hectare de cannabis. Ils sont venus à cause de la rumeur publique et l’inquiétude de certains notables.
POULET-FLIC (Paroles & Musique: Michel Prades)
Perquisition au chaud dans ma maison
Une forêt de képis soudain nous envahit.
Fermez les portes, que personne ne sorte,
Enfilez les gants, mettez-les en rang.
Le Poulet-Flic
C’est le Rock du Dimanche.
Le Poulet-Flic
Vous en reprendrez bien une tranche.
C’est l’hécatombe, les feuilles tombent
Dans la fosse « sceptique » les vers psychédéliques
S’envoient en l’air pour tout l’hiver.
Bravo les débiles: on se tiendra tranquille.
Le Poulet-Flic
C’est le Rock du Dimanche.
Le Poulet-Flic
Vous en reprendrez bien deux tranches.
Me faites pas chier dans ma vie privée.
Flics dans la rue, policiers en rut,
Contravention, légalisation.
Gendarmerie Nationale bonjour le code pénal.
Le Poulet-Flic
C’est le Rock du Dimanche.
Le Poulet-Flic.
Cela m’a décidé d’appeler mon groupe : « Gendarmerie Nationale ». Il y avait un batteur, une bassiste, deux guitaristes et un saxo et moi qui chantions mes paroles. Nous répétions tous les samedis au Château de Ligoure à côté de ma ferme. Nous faisions des concerts à Limoges, à Châteauroux et à Périgueux. Nous avons enregistré à Venise une cassette dans un studio. C’était un groupe de Rock Agricole.
LES FAUX ROCKERS (Paroles & Musique: Christine Desvaux)
Le public serre les fesses,
Les mecs s’mordent les doigts.
Ils n’ont pas mérité ça :
Distribution de boules Quiès.
Car on est pas des vrais rockers.
La bagarre ça nous fait peur.
On est pas des vrais rockers.
Le sang nous fiche mal au cœur.
Le chanteur s’est radiné.
Y’venait d’soigner ses poulets.
Trempé de la tête aux pieds
Il s’est mis à brailler.
On est pas des vrais rockers.
On descend juste du tracteur.
On est pas des vrais rockers.
On y r’tournera tout à l’heure.
Les guitares bonnes pour la casse.
J’vous parle même pas de la basse.
Le batteur a la goutte au nez.
C’est nous les allumés des fins de soirée.
On est pas des vrais rockers.
On joue dans un congélateur.
On est pas des vrais rockers.
Y’a qu’a zieuter notre batteur.
On est pas des vrais rockers.
T’as vraiment l’air d’un plouc.
On est pas des vrais rockers.
Au fait comment va ta sœur.
Et puis c’est l’accident. Un samedi de novembre 1983. Mon tracteur fut percuté par une voiture : 3 mois dans le coma et une hémiplégie droite. Pendant mon coma, ma compagne me faisait écouter la cassette de mon groupe. Je battais le rythme avec la main gauche. Au bout de trois mois, on m’a posé une valve pour décongestionner le cerveau. Je repris conscience. Pendant mes six mois de rééducation à l’hôpital, je regardais la télé et j’écoutais les cassettes de Rock que m’apportaient mes nombreux copains. Quand je suis sorti de l’hôpital en juillet 1984, j’ai réuni mes musiciens pour une répétition. Ils jouaient et moi je ne faisais que « La, La, La » dans le micro.
RICHARD :
Un jour Michel est revenu dans la vie comme ça et il est revenu quelques années plus tard un peu cassé. Il a eu un accident. Son tracteur qui n’avait pas répondu. Il est revenu beaucoup cassé. Avec une espèce exemplaire, complètement gai, complètement ludion, comme une espèce de libellule à qui il serait arrivé un accident de parcours mais ce n’était qu’un accident de parcours et il n’était pas définitif.
Et puis, j’ai recommencé à faire de la radio. Il est venu de temps en temps avec des recueils de poèmes et au fur et à mesure des mots, du temps je me suis aperçu qu’il bossait vachement. Qu’il écrivait beaucoup de trucs, de musique. Qu’il ne se laissait pas du tout entourlouper par son expérience tragique. Par quelque qui aurait pu détruire quelqu’un de moins fort ; quelqu’un de moins structuré ; quelqu’un de moins volontaire alors il a reconstruit son soi-même. Peut-être qu’il n’a pas reconstruit pour la première fois. Je n’ai pas l’impression qu’il a été détruit son soi-même. Au contraire, il est sorti encore plus fort qu’il ne devait l’être. Il a toujours un point de vue sur la vie. Il a toujours eu une idée de ce qu’il ne voulait pas.
MICHEL :
Durant deux ans, j’allais voir trois fois par semaine Jean-Pierre Lissandre, orthophoniste à Limoges. Il me faisait travailler la mélodie, compter, faire des mots-croisés et d’autres exercices. Il m’a pris dans le « coma ». Il me faisait de l’éveil. Articuler les mots et former des phrases. On s’entendait bien. Il appréciait mon « humour »
VAMPYR (Paroles & Musique: Michel Prades)
Je suis le vampire de ces dames.
Je suis l’homme qu’il faut.
J’irais coucher avec vos femmes
Et les saignerai dans votre dos.
Je reconnais que j’ai tous les vices.
Qu’étymologiquement je suis un vicieux.
Que j’ai le sourire de la malice,
Un air sadique au fond des yeux.
Que j’ai pas peur de dire toutes
Les horreurs qui passent chez moi
Et que ceux qui les écoutent
N’en reviennent toujours pas.
Que j’ai les refrains d’un obsédé,
Les leitmotivs d’un pédé
Et j’ai pas peur de vous avouer
Que vous vous êtes tous trompés.
THIERRY :
Il a eu une hémiplégie: paralysie de la moitié du corps et il a été Aphasique. Les gens ne savent pas ce que c’est aphasie.
RICHARD :
Aphasie. Moi non plus, je ne sais pas très bien ce que c’est. Je sais simplement quand je vois mon pote Michel. Lui, dans son cas, aphasique, ça serait presque une qualité. Je ne vois pas ce qui pourrait le déranger. C’est hallucinant.
THIERRY :
A priori, c’est un trouble de la parole.
RICHARD :
En fait, c’est un trouble de la parole qui est un peu plus compliqué pour lui mais qu’on a tous même si on a l’air d’être des impénitents bavards ; pouvoir allonger les mots de cette belle langue l’un derrière l’autre sans trop de difficulté. Lui a pas de difficulté à les mettre l’un après les autres. Il a des difficultés d’élocution. Mais comme il a des mirettes, comme il a le sourire, il a tout le machin. Il s’est fait une panoplie d’enfer pour remplacer la ponctuation ou pour la mettre ou pour prendre des temps. Je souhaite à tout le monde d’avoir la même réaction en face d’un truc qui peut arriver à n’importe qui. C’est assez exemplaire.
MICHEL :
Nous sommes venus à Paris en décembre 1985. J’ai fait connaissance du professeur Jean-Louis Signoret, le neurologue et Philippe Van Eeckhout, l’orthophoniste. Philippe m’a fait travailler à partir d’une de mes passions: le chant. Je le voyais tous les mercredis après-midi à l’hôpital de la Salpetrière. Dominique Obadia, une autre orthophoniste, venait à domicile. Ils m’ont fait parler et dire des textes oralement. J’ai eu envie de composer des nouvelles chansons. Philippe aussi. Par ailleurs, j’écrivais quotidiennement mon journal. J’ai contacté Thierry Desvaux, le guitariste de mon groupe « Gendarmerie Nationale » qui habite aussi Paris. Il est venu me voir avec sa guitare et j’ai repris avec lui mes anciennes et les nouvelles chansons. Thierry est superbe. Il a tout compris.
LE BLUES (Paroles: Michel Prades / Musique: Thierry Desvaux & David Mascunan)
Le blues, le blues est venu chez moi.
Il est, il est entré par la porte.
Je lui ai bien tendu le bras
Mais c’est moi qu’il a fallu que je sorte.
J’ai dit, redit à tous mes copains
Que je ferais la grève de la faim.
Mais sûr c’était le blues
Qui m’avait tout bouffé mon pain.
Moi, moi qui avais rangé ma guitare
Depuis, depuis bientôt plusieurs années,
Et c’est lui qui dare-dare
Me l’a ressorti du grenier.
J’ai cru que c’était pour un feu de bois,
Mais le blues était pas venu pour ça
Il m’a mis dans les oreilles
De quoi me chauffer toute l’année.
RICHARD :
Prades, j’ai une attirance particulière. Il a fait de la musique. Il a tout travaillé. Il a fait beaucoup de cassettes, beaucoup de textes. Prades, c’est un pamphlétaire. C’est un mec en colère. C’est un anar, peut-être. Que cette fameuse difficulté d’élocution a fait que ça l’arrange bien. Comme ça, de temps en temps, en face des événements, il ferme sa gueule et puis il n’en pense pas moins. Et les gens disent qu’il a des difficultés à parler mais, peut-être, que le renard ça l’arrange bien, à certains moments, d’avoir des difficultés à parler. Et alors pendant ce temps-là il enregistre, il observe. Il n’a pas une grande considération pour les hommes politiques. Il n’a pas une grande considération pour le pouvoir. Alors voilà, il aime bien les gens. Prades, c’est un humain.
MICHEL :
Nous avons fait trois concerts à l’hôpital de la Salpetrière devant quelques orthophonistes et amies. J’ai expliqué au Groupe des Aphasiques d’Ile-de-France mon désir d’enregistrer dans un studio. Ils m’ont écouté et le trésorier m’a donné un chèque de cinq cents francs afin que je le réalise. Nous avons enregistré avec Thierry Desvaux quatre chansons au Studio Campus à Paris.
RICHARD :
C’est un fulgurant. C’est pas un intello. Ma foi, il me paraît avoir une vie, peut-être pas une vie facile, pas à cause de qu’on pourrait appeler un handicap mais à cause du fait que la vie n’est pas facile pas plus pour lui que pour les autres. Mais ça a valeur d’exemple parce qu’il a lutté contre les retombées de l’accident et qu’il est remonté sur ses pattes et ma foi je pense qu’un jour on sera plus nombreux à le connaître.
FEMME (Paroles & Musique: Michel Prades)
Femme qui fume le cigare.
Femme qui porte bien le fard.
Femme qui ne fait pas l’trottoir.
Femme d’eau et dérisoire.
Femme, femme reviens me voir.
Femme, femme reviens me voir.
Femme qui danse dans le noir.
Femme perdue, femme miroir.
Femme qui cache dans ses tiroirs
Ses amours des nuits, des nuits noires.
Femme, femme reviens me voir.
Femme, femme reviens me voir.
Femme qui désire encore boire.
Femme qui hurle de désespoir.
Femme qui traîne son cafard.
Femme d’un jour, femme d’un soir.
Femme, femme reviens me voir.
Femme, femme reviens me voir.
MICHEL :
En 1989, avec mon groupe « Gendarmerie Nationale » nous avons réalisé une cassette regroupant : Poulet-Flic, Les Faux Rockers, Femme, enregistrée à Venise en 1982 et notre dernière production parisienne et limougeaude: Vampyr, Le blues & Je suis.
JE SUIS (Paroles: Michel Prades / Musique: Pierre Bianchi)
Je suis en payant, entamé, enfoiré, enfumé, emmerdant,
Entre-deux gémeaux.
Je suis gémeaux.
Je suis laid, lacéré, lâche, là-haut ou là-bas,
Entre-deux labeurs.
Je suis laborieux.
Je suis pragmatique, impraticable, prédécoupé
Préservatif, préservative, entre-deux prés
Je suis PRADES…
IL FAUT SE DIRE (Paroles: Michel Prades / Musique: David Mascunan)
Je sens que ces quelques vers ont de l’importance.
Qu’ils ne sont placés là comme des choses inutiles.
Il faut de dire
Qu’une vie,
Faite de poésie,
Et de lumières
S’échappe des sombres
Journées sans vie.
Qu’il faut à la nature
Lui donner de son soi
La laisser pensive,
Attendant avec impatience
Qu’elle hoche la tête
Pour dire, qu’elle a compris.
Je sens que tout ici
A besoin d’être vécu.
Si nous perdons
Ce peu de choses là
Nous n’aurons rien à dire
Mais le corps plein de larmes.
RICHARD :
C’est la morale sur le combat de Michel : ce tracteur mythologique qui un jour l’a broyé. Dans ce texte-là, il y a cet appel total, vertical, horizontal ; derrière l’horizon, le soleil : la vie avant tout. C’est pour ça qu’il va très bien. Il va très bien d’ailleurs.
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Crédit photos Babelio.com
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Je remercie sincèrement Michel PRADES d’avoir eu l’amitié de se livrer à ce jeu des questions-réponses.
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Auteur, sculpteur, peintre, photographe, acteur, comédien, théâtreux, styliste, musicien, chanteur, colleur de papiers, en un mot artiste sans discrimination de l’art pratiqué,
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Pour se manifester si vous êtes intéressé par le questionnaire :
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© Jean-Louis RIGUET 08 Juillet 2017
Sociétaire de la Société des Gens de Lettres
https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Louis_Riguet
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